Évolution des besoins en matériaux pour les chantiers du Grand Paris.
Première approche pour le béton

Près de 36 millions de m² programmés, à construire ou à réhabiliter, ont été estimés à horizon 2024 et représentent un enjeu important dans l’évolution des matériaux de construction de plus en plus décarbonés.

Centrale à béton Eqiom, port de Pantin, Pantin, canal de l’Ourcq © Apur – David Boureau

Des mutations urbaines importantes sont engagées dans la métropole du Grand Paris. En lien avec la réalisation du métro du Grand Paris Express, les Jeux olympiques et paralympiques de 2024, les plans de rénovation énergétique ou les opérations d’aménagement, ce sont près de 500 projets qui sont attendus. Ces constructions à venir vont générer des besoins en matériaux de construction parmi lesquels le béton représente une place encore prépondérante, ce qui en fait le matériau manufacturé le plus utilisé au monde.

Pour empêcher la raréfaction de certaines matières comme les granulats naturels et le sable, matières premières principales du BTP et ressources nécessaires à la production de béton prêt à l’emploi (plus de 75 % de sa composition), l’Apur a souhaité étudier l’évolution des besoins en matériaux pour le secteur du BTP et en particulier le cas du béton, mais aussi des nouveaux matériaux de construction en expérimentation ou en développement.

L’étude présente :

  • Dans une première partie, le maillage des centrales à béton dans le Grand Paris et une estimation des surfaces à construire dans les années à venir ;
  • Dans une seconde partie, une estimation des quantités de matériaux nécessaires avec la production de béton actuelle dans la métropole du Grand Paris ainsi que des scénarios d’évolution de construction en bois de 10 à 30 % ;
  • Et enfin dans une troisième partie, les conditions d’acceptabilités nécessaires pour le maintien des centrales à béton en milieu urbain dense.

 

 

Les centrales à béton au regard des opérations d’aménagement

Le maillage existant des centrales à béton

Au sein de la métropole du Grand Paris, l’Apur a recensé 59 centrales à béton ; 20 sont des centrales mobiles et 39 sont fixes.
Les centrales à béton mobiles, se situant directement sur les chantiers, permettent de les alimenter en béton à partir d’un besoin de 6 000 à 8 000 m³ de béton. Dans la MGP, ces centrales mobiles se trouvent principalement sur les chantiers de construction d'ouvrages et notamment du métro du Grand Paris Express.
La majorité des centrales de la métropole du Grand Paris ont un accès fluvial : 33 centrales sur les 39 fixes se trouvent en bord à voie d’eau. Parmi celles-ci, 3 ont aussi un accès ferroviaire (Cemex à Athis-Mons, Unibéton et Vicat à Gennevilliers) ; une seule centrale dans la MPG, Eqiom à Paris Batignolles, a un accès ferré mais pas d’accès fluvial.
Les 6 centrales fixes de la MGP n’ayant qu’un accès routier sont majoritairement situées à proximité des grands axes routiers. Les centrales mobiles, installées sur les chantiers d'ouvrages ou d'opérations d’aménagement qu’elles alimentent, n’ont en général qu’un accès routier.
D’après l’UNICEM, les centrales présentes dans la MGP ont permis de produire 4,25 millions de m³ de béton en 2018. La production de béton est en légère hausse depuis 15 ans, avec une augmentation de 24 % par rapport à 2006.

Nombre de centrales fixes recensées par territoire © Apur

 

accès des centrales à béton de la Métropole du Grand Paris © Apur

 

Accès des centrales à béton « fixes » de la MGP © Apur

 

L’estimation des surfaces à construire dans les secteurs de projets

On dénombre parmi les opérations d’aménagement de la métropole du Grand Paris, hors NPNRU, presque 30 millions de m² attendus dont 14 millions d’ores et déjà prévus à horizon 2024. Ces surfaces sont réparties sur près de 500 projets : des ZAC déjà engagées, le secteur des Jeux de Paris 2024, des projets d’infrastructure et de transport… Ces chiffres prennent en compte sans distinction la création neuve et la réhabilitation. En complément des surfaces programmées dans les ZAC et autres opérations d’aménagement, il convient d’ajouter 3 millions de m² de programmation qui sont prévus dans les NPNRU, dont 2 à horizon 2024.
Au total, 3,2 millions de m² sont programmés annuellement entre 2020 et 2024 dans les opérations d’aménagement et les quartiers NPNRU dans la MGP.
Entre 2025 et 2030, ce sont 1,9 million de m² qui sont déjà prévus chaque année. Au-delà de 2025, les chiffres pourront être amenés à évoluer car les opérations d’aménagement qui seront à construire après 2024 n’ont pas toutes une programmation définie.

À Paris, d'ici 2024, il est prévu 1,1 million de m² à construire et 92 000 m² à réhabiliter dans les secteurs d’aménagement, entre les logements, les bureaux, les surfaces d’activités et les équipements. À terme, ce seront 1,7 million de m² à construire ou à réhabiliter entre 2025-2030 et 1,9 million estimé sur la période 2030-2040.

 

surfaces annuelles moyennes à construire ou à rénover dans les opérations d'aménagement uniquement (hors diffus) avant 2024 et par territoire © Apur

 

Des centrales à béton existantes à proximité des secteurs de projet

Sur les 39 centrales à béton « fixes » localisées dans la métropole du Grand Paris, 10 sont localisées dans une opération d’aménagement ou aux abords. Les autres centrales « fixes », qui ne se trouvent pas à proximité immédiate d’une opération d’aménagement, sont en moyenne à 410 mètres de l’opération d’aménagement la plus proche.
Les opérations d’aménagement en cours dans la MGP sont quant à elles localisées en moyenne à 1,74 km d’une centrale à béton.
Le maillage des centrales à béton est relativement en lien et en cohérence avec les grands projets d’aménagement à l’exception de deux secteurs au nord-est de la métropole autour des opérations d’aménagement de Roissy sur le territoire de Paris Terres d’Envol et dans les secteurs de projet au sud d’Est Ensemble.

les centrales à béton et les opérations d’aménagement © Apur

 

Les trajectoires et évolutions des besoins en béton à terme

Estimation de la construction en secteur diffus (hors ZAC)

Afin d’estimer les surfaces à construire et réhabiliter en dehors des opérations d’aménagement, nous avons utilisé les surfaces en m² autorisées dans les permis de construire de la base de données Sitadel. Ainsi, entre 2007 et 2017, 33,1 millions de m² ont été construits ou rénovés dans la MGP, en dehors des ZAC et autres opérations d’aménagement.
À partir des tendances passées, l’Apur a estimé les surfaces qui seront construites dans le secteur diffus à 4 millions de m² par an entre 2020 et 2024 et à 3 millions de m² par an entre 2025 et 2030 sur la base d'une poursuite de la courbe de tendance jusqu'en 2024, puis stabilisation au-delà de 2025.

L’estimation des besoins en béton au regard du développement d’alternatives au béton

À partir des surfaces à construire, l’utilisation de ratios permet d’estimer les quantités de matériaux nécessaires pour les constructions à venir, selon le type de construction. Ces estimations en m² concernent les constructions de bâtiments représentant globalement près de 70% de la production du béton. Le reste concerne l’aménagement des espaces publics, des ouvrages et infrastructure. 

Pour les 16 millions de m² dans les opérations d’aménagement et NPNRU prévus à horizon 2024, 6,3 millions de m³ de béton seraient nécessaires dans le cas d’une construction 100 % béton.¹
Pour ce qui est du diffus, 8,6 millions de m³ de béton seraient nécessaires pour les 20,5 millions de m² estimés.

Ainsi, afin de satisfaire les besoins pour les opérations d’aménagement, les NPNRU et le secteur diffus du Grand Paris, 3 millions de m³ de béton seraient nécessaires chaque année de 2020 à 2024 en calcul de référence.

Le scénario envisagé est d’utiliser du bois pour une partie de ces bâtiments. En effet, le bois est un matériau de construction alternatif au béton dont la filière est assez mature pour permettre de construire ou rénover une partie des surfaces prévues dans la MGP. D’ici 2024, il semble réalisable de construire ou rénover 10 % des surfaces prévues en bois, car cette filière est encore neuve. Il faudrait alors 280 000 m³ de bois afin de satisfaire la demande en bois pour les opérations d’aménagement et les quartiers NPNRU, et 360 000 m³ de bois pour le secteur diffus ; les besoins en béton seraient au total de 14,1 millions de m³.
Au total, ce seraient donc 128 000 m³ de bois nécessaires chaque année entre 2020 et 2024, afin de construire 10 % des surfaces prévues en bois et 2,8 millions de m³ de béton par an.

tableau récapitulatif des opérations d’aménagement et NPNRU (hors diffus) © Apur

 

Entre 2025 et 2030, 11,6 millions de m² sont prévus à construire et rénover dans les opérations d’aménagement et les NPNRU. Dans le secteur diffus, 18 millions de m² sont estimés. Au total, 4,9 millions de m² sont prévus et estimés chaque année entre 2025 et 2030 en moyenne. Si toutes ces surfaces étaient construites en béton uniquement, il faudrait 4,6 millions de m³ de béton, pour les opérations d’aménagement et les NPNRU, et 7,6 millions de m³ de béton pour le secteur diffus. Au total, ce seraient 2 millions de m³ de béton qui seraient nécessaires chaque année sur cette période pour la construction ou rénovation de bâtiments.

Le scénario envisage que la filière bois soit suffisamment constituée à partir de 2025 avec 30 % des surfaces prévues construites en bois. Il faudrait 610 000 m³ de bois pour les opérations d’aménagement et les NPNRU, et 950 000 m³ pour le secteur diffus. Au total, pour les opérations d’aménagement, les secteurs NPNRU et le diffus, il faudrait 260 000 m³ de bois chaque année. Il faudrait alors 660 000 m³ de béton chaque année pour les secteurs d’aménagement et 1 million de m³ pour le secteur diffus.

 

 

Les constructions préfabriquées en bois © Apur

En parallèle du développement de la filière bois, on peut également penser que de nouveaux matériaux aujourd’hui émergents seront alors davantage matures et pourront être utilisés. Par exemple la construction en terre, filière en plein essor, pourrait être utilisée à grande échelle. À plus long terme, on peut aussi penser que d’autres matériaux biosourcés, comme le chanvre, le lin ou le miscanthus, pourraient aussi être utilisés comme matériaux de construction, dans des proportions limitées qui ne permettraient pas d’envisager la fin du béton mais de réduire son besoin au fur et à mesure du développement de ces filières émergentes.
L'étude pourra être actualisée en fonction de nouveaux engagements des collectivités à venir.

 

montage de 3 photos de matériaux de construction © voir sur les photos

 

Les conditions d’acceptabilité des centrales à béton en zone dense

Une meilleure acceptabilité des centrales à béton en zone dense passe par leurs insertions paysagères, architecturales et environnementales. Différentes chartes – la charte « Sable en Seine » ou la charte d’Amélioration des Ports – visent à une amélioration de l’intégration urbaine, architecturale et paysagère des sites industriels sur les ports, et donc des centrales en bord à voie d’eau, par exemple par une emprise au sol limitée des installations, des transparences, des mises en lumières ou des structures sur pilotis pour préserver les vues vers la Seine. La possibilité de partager le quai avec les promeneurs est aussi un enjeu important de l’implantation des centrales en zone dense.

Des synergies avec les plateformes de traitement de déchets, ou le développement de Quais à usages partagés sur les centrales connectées au fleuve, permettraient de lier les centrales à béton à d’autres filières ou industries.

De plus, la proximité des centrales à béton et du fleuve (85 % des centrales fixes ont un accès fluvial) permet de favoriser le transport fluvial pour les matières premières, ce qui permet d’éviter la congestion des routes tout en diminuant l’empreinte carbone du transport des matières premières. À titre d’exemple, l’acheminement des granulats et de sables par transport fluvial depuis la carrière de Monterau-Fault-Yonne (77) vers les centrales à béton parisiennes, représente un gain de 76 % en termes de CO2 du fluvial par rapport à la route selon les données de Ports de Paris.

Enfin, les centrales à béton commencent à fabriquer des bétons plus respectueux de l’environnement : bétons drainants, bétons à partir de déchets d’autres industries… L’utilisation de granulats recyclés, fabriqués à partir de bétons issus de démolitions, commence à se répandre, mais reste encore faible. L’Île-de-France produit 1/5e de la production annuelle de granulats recyclés, ce qui a représenté 6,1 millions de tonnes de granulats recyclés pour l’année 2018.

Préserver des emprises de services urbains dont celles servant aux matériaux de construction dans le coeur de la Métropole est un enjeu majeur dans un contexte de pression foncière. Afin de garantir leur acceptabilité, il est indispensable de travailler leur insertion paysagère, leur compatibilité augmentée avec d’autres usages et intégrant l’évolution des types de matériaux recyclés et de nouvelles filières.

Mise en lumière du port de Tolbiac, Paris 13e © Apur

 

¹ Les ratios utilisés pour la construction en béton sont de 0,35 pour le logement, le commerce et l’activité et de 0,5 pour le bureau, équipement et hôtel. Source : Bouygues / Elan

Ressources

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  • Étude

    Évolution des besoins en matériaux pour les chantiers du Grand Paris. Première approche pour le béton

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  • Synthèse

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