Les sites logistiques actuels et potentiels
Contribution au groupe de travail immobilier pour la stratégie logistique parisienne

Pour alimenter la réflexion sur l’immobilier logistique actuel et les besoins à venir, l’Apur propose une analyse du maillage existant et des sites potentiels.

Faisceaux ferroviaires de la Gare de Lyon (12e) © Ph.guignard@air-images.net

Ce travail, réalisé dans le cadre du groupe de travail Immobilier logistique piloté par la Ville de Paris et la Sogaris, illustre la situation actuelle du maillage des sites logistiques et propose des ouvertures vers les évolutions futures.

L’objectif vers lequel tend ce travail est d’identifier les quartiers parisiens où la pression logistique est forte et les secteurs où la construction de nouveaux équipements de logistique serait la plus stratégique. Cette réflexion est dans la continuité des travaux menés par l’Apur pour alimenter aussi le bilan du PLU et la révision vers un PLU bioclimatique.

Une approche par croisement de l’offre et de la demande de logistique est proposée faisant apparaître des zones où la demande est plus forte ce qui permet de définir des zones de carence en logistique. Ces zones se révèlent par la superposition géographique des zones dotées en espaces logistiques et de celles où l’on estime une forte demande en mouvements logistiques. Les sites sont répartis en trois catégories en fonction du type de destinataire qu’ils vont desservir :

  • les sites logistiques du BTP ;
  • les sites du e-commerce et de la messagerie (en B2C) ;
  • les sites de la distribution professionnelle (en B2B).


Analyse du maillage actuel

Les sites logistiques du BTP

La première catégorie concerne les emprises dédiées à la distribution et au traitement des matériaux du BTP. Pour subvenir aux besoins des nombreux chantiers en cours et à venir dans Paris et la Métropole du Grand Paris, un maillage de sites aux fonctions variées existe déjà et est représenté sur la carte ci-contre. Sont pris en compte les entrepôts de vente de matériaux de chantier pour l’approvisionnement de ces derniers, ainsi que ceux qui participent à l’évacuation des déchets qui constituent autant de flux à traiter.

Pour les sites d’approvisionnement, seules les grosses plateformes de matériaux sont représentées. Les magasins de matériel, d’outillage ou de bricolage ne sont pas présents. Les chaînes les plus représentées sont Point.P, Raboni et La Plateforme du Bâtiment. Ces points de distribution de matériaux sont souvent placés à proximité des grandes infrastructures de transport (Seine, canaux, autoroutes), ce qui est indispensable pour massifier leur approvisionnement.

1-  Sites de distribution et collecte des déchets pour le BTP © Apur


En ce qui concerne l’évacuation des matériaux, les sites de collecte et/ou de traitement des déchets ont été représentés, à partir des données présentes sur le site dédié de la Fédération Française du Bâtiment et de données de l’ORDIF, traitées par l’Apur.
Les centrales à béton ont également été représentées puisqu’elles sont un maillon indispensable de la chaîne d’approvisionnement des chantiers.

À partir des données collectées depuis plusieurs années par l’Apur sur les différents projets d’aménagement en cours et à venir, les grands secteurs de projets ont pu être superposés. On remarque que le maillage de sites d’approvisionnement ou d’évacuation correspond souvent aux zones de projets. Ils sont également utilisés pour répondre à la demande des chantiers en secteur diffus.

Les sites logistiques dédiés au BTP bénéficient d’une bonne accessibilité routière.

La proximité du fleuve et/ou des infrastructures ferroviaires est également un avantage qui permet l’utilisation et développement de ces modes d’acheminement ou d’évacuation plus vertueux en termes d’émissions de CO² notamment. La carte ci-contre propose une vision synthétique de l’ensemble.

2- Photos © HAROPA PORT et Apur

 

Les sites logistiques du e-commerce et de la messagerie

La deuxième catégorie de sites logistiques correspond aux lieux de départ pour les livraisons aux particuliers (B2C-Business to consumer). Il s’agit donc des espaces logistiques liés au e-commerce (stockage temporaire ou permanent pour la distribution e-commerce) ou bien des sites de messagerie (tri ou stockage temporaires de colis). Ces filières sont en forte croissance avec l’avènement de la vente en ligne dopée par la crise sanitaire. La tension sur le marché des espaces logistiques de ce type est assez forte et les caractéristiques des actifs représentés se diversifient. Parmi les sites cartographiés, on trouve aussi bien des petites voire très petites surfaces permettant simplement le transbordement (cross-docking) des colis avant leur distribution finale que des plateformes de taille moyenne où du stockage peut être pratiqué, et d’où vont partir des véhicules de plus forte capacité.
Le travail de recensement des sites actuels et des projets s’est fait à l’échelle parisienne, les données étant difficiles à récolter à l’échelle métropolitaine. Toutefois, par souci de compréhension, les entrepôts métropolitains identifiés en 2017 pour l’Atlas des grandes fonctions métropolitaines sont présentés.

Pour entrevoir la tendance future et apprécier la dynamique actuelle de création d’espaces logistique, les projets récents pour lesquels un permis de construire a été déposé figurent sur la carte. La réalisation de ces projets est bien engagée (les travaux ont déjà commencé pour certains d’entre eux). Les projets à l’état moins avancé (pas de permis déposé pour des surfaces de logistique) figurent dans la suite de ce document dans la cartographie des opportunités.

La répartition de ces sites est superposée à la densité de population évaluée par l’Insee afin d’entrevoir les zones où la concentration de population est forte et où l’implantation d’un espace logistique lié au e-commerce serait le plus bénéfique. On constate ainsi que certains quartiers sont peu pourvus en ELU alors qu’ils abritent un grand nombre d’habitants, notamment dans l’Est et le Nord-Ouest. Certains quartiers périphériques de Paris peuvent aussi dans certains cas être desservis par des sites logistiques localisés dans les communes limitrophes.

3- Sites de messagerie et e-commerce B2C © Apur

 

Sites de la distribution en B2B

La troisième catégorie de sites logistiques concerne ceux utilisés par la distribution à destination des entreprises (B2B - Business to Business), qu’il s’agisse de bureaux, commerces restaurateurs… Les sites recensés sont souvent implantés sur de grandes emprises logistiques (dans le 12e, 18e arrondissement…), ou bien sont des espaces de plus petite taille pour la distribution du dernier kilomètre et qui répondent aux mêmes caractéristiques que les ELU du B2C.
Comme pour la carte précédente, l’échelle de ce travail est le territoire parisien avec ajout des sites métropolitains et des projets récents pour lesquels un permis de construire a été déposé.

À cette cartographie des sites est superposé le nombre de mouvements de marchandises hebdomadaires pour chaque carreau de 2 ha. L’estimation du nombre de mouvements (livraisons ou enlèvement de marchandise) hebdomadaires a été faite à partir de ratios statistiques issus des enquêtes TMV (Transport de Marchandise en Ville). Les mouvements observés au cours des enquêtes ont été ramenés au nombre d’employés du secteur considéré. Ainsi, pour chaque type d’activité (bureau, pharmacie, restauration…) est associé un nombre de mouvements estimé, proportionnel au nombre de salariés du local d’activité considéré. La présence de nombreux emplois dans les quartiers du centre et de l’ouest explique les fortes concentrations de mouvements estimés dans ces zones. Les activités de messagerie et du e-commerce ne sont pas prises en compte dans ces ratios.

 

4- Sites de distribution B2B © Apur

La faible présence d’entrepôts B2B sur le territoire parisien met en évidence le lien fort avec les sites logistiques métropolitains qui sont essentiels aux activités parisiennes (plateforme de Rungis par exemple). Toutefois, dans un objectif de décarbonation du dernier kilomètre, des espaces logistiques de plus petite taille pourraient être intéressants pour mieux répartir et mailler le territoire. Par ailleurs, le quartier d’affaires parisien semble disposer de peu de sites logistiques au regard de l’intensité de la demande. Il est à noter que la pression foncière est également très forte sur ce secteur.

Synthèse

Cette carte propose une vision synthétique de l’ensemble des sites recensés pour ce travail. Elle croise les trois types de sites étudiés précédemment. En fond de plan, la densité humaine, additionnant emplois et habitants, donne un aperçu de la concentration potentielle en livraisons dans la zone. On retrouve ainsi les zones précédemment identifiées comme faiblement dotées en espaces logistiques : dans le Nord-Ouest, l’Est et autour du quartier central des affaires. L’approche est toutefois à nuancer car les schémas logistiques varient d’une filière à une autre, et selon les transporteurs ou logisticiens concernés. Aussi, la présence d’un ELU dans une zone ne signifie pas que tous les flux vont y transiter.

5- Synthèse : sites existants et en projet © Apur


Étude des opportunités

Les sites d’opportunité identifiés

De nombreux sites sont d’ores et déjà identifiés comme propices à l’accueil d’espaces logistiques. Cette carte présente le maillage des sites potentiels connus.
Certains sont des lieux où un projet incluant de la logistique est aujourd’hui connu mais pour lesquels il n’y a pas encore eu de permis de construire.
D’autres n’ont pas encore de projet connu mais constituent des opportunités dans la mesure où ils présentent des caractéristiques favorables à la logistique. Il s’agit des périmètres de localisation (Ploc) logistiques inscrits dans le PLU et n’ayant pas encore fait l’objet d’un projet, ou des plateformes de transit des marchandises repérées elles aussi sur les documents graphiques en zone UV du PLU.
Enfin certains parkings automobiles ayant des caractéristiques propices à la logistique et des sites anciennement utilisés pour la logistique sont représentés.

6- Sites d'opportunité déjà identifiés © Apur

 

En comparant cette carte avec les zones faiblement dotées en espaces logistiques mises en avant dans les cartes précédentes, on constate qu’il existe de nombreuses opportunités à investir pour répondre à ces besoins. Les périmètres de localisation inscrits au PLU depuis 2016 ont comme objectif de constituer ce maillage et leur présence dans certains quartiers indique des opportunités à fort potentiel. Pour développer le maillage en ELU, de nouvelles parcelles pourraient être ajoutées à la liste des périmètres de localisation logistiques.

Par ailleurs, les sites les plus propices à l’accueil d’une activité logistique sont ceux disposant d’une bonne accessibilité routière. On pourra également rechercher des sites à proximité du fleuve et du fer dans une optique de report modal depuis la route vers le développement du fret fluvial et ferré.

Les pistes de nouvelles opportunités

Les sites d’opportunité pourront être complétés par de nouveaux sites potentiels. La dernière carte proposée ouvre ainsi des perspectives vers de nouvelles opportunités d’implantations logistiques. Il s’agit de bâtiments dont l’activité actuelle pourrait impliquer des caractéristiques intéressantes pour l’implantation d’ELU.
Les commerces automobiles sont encore nombreux à Paris et une petite partie d’entre eux disparaît chaque année en lien avec la baisse de l’utilisation de la voiture. Parmi eux, ceux qui possèdent des caractéristiques intéressantes (dimensions, portance, accès…) peuvent être étudiés pour y installer des activités logistiques.
De même les centres bus de la RATP disposent de caractéristiques architecturales intéressantes et peuvent être mutualisés en journée, lorsque les bus ne sont pas garés dans les entrepôts (des projets sont déjà en cours ou en activité sur certains d’entre eux). Ont été représentés ceux n’ayant pas encore fait l’objet de projet logistique, et pour lesquels des pistes pourraient être étudiées.

7- Vers de nouvelles pistes d'opportunités ? © Apur

 

Les emplacements pour autocars (inclus dans le « Pass Autocar ») peuvent également constituer des pistes pour la logistique à étudier en cas de projet de reconversion ou restructuration.

Enfin, les parkings automobiles publics ont été représentés, qu’il s’agisse de parkings commerciaux ou bien de parkings concédés par la Ville de Paris. Si la hauteur maximale des véhicules reste un des critères rédhibitoires pour l’implantation d’ELU dans des parkings, on constate que certains d’entre eux offrent des hauteurs supérieures à la normale et peuvent ainsi constituer des pistes à étudier. On remarque également que certains des sites logistiques actuels ont été implantés dans des parkings à faible hauteur sous plafond : les parking Harlay Pont Neuf, Concorde, Saint Germain l’Auxerrois et Saint Germain des Prés ont des hauteurs maximales admissibles de 1m90. Cela montre que des adaptations peuvent être faites pour implanter ces espaces dans le tissu dense.

8- Photos © Apur

 

Une fois ces bâtiments identifiés, de nombreux critères sont à appliquer pour révéler les meilleures opportunités pour implanter un espace logistique : l’accessibilité routière, fluviale, ferrée, tout comme la capacité d’accueil de poids lourds, les pentes des rampes d’accès, la portance des sols...

Une diminution du nombre de commerces automobiles

La base de données des commerces (BDCom) tenue et actualisée régulièrement par l’Apur nous donne un aperçu du nombre et de la localisation des commerces liés à l’automobile à Paris. Pour évaluer ces données les catégories de commerces suivantes ont été sélectionnées : concessionnaires (avec ou sans garage attenant), garages, contrôles techniques et stations-service.
N.B. : Le recensement de la BDCom (base de données des commerces) est effectué par estimation depuis la rue et agrège certaines catégories de commerces. Dans la rubrique « concessions automobiles », on trouve aussi bien des locaux avec espace d’exposition et/ou de réparation de véhicules que de simples agences qui présentent des catalogues de véhicules qui ne sont pas garés dans le local. Leur taille est donc très variable.

Les deux dernières mises à jour de la BDCom datent de 2017 et 2020. En 2017, on recensait 442 commerces automobiles sur le territoire parisien alors qu’en 2020, on en a compté 395. La comparaison des deux jeux de données fait apparaître 79 mouvements de commerces automobiles dont :

  • 16 créations de commerces automobiles (3 garages, et 13 concessions automobiles), et ;
  • 63 disparitions de commerces (31 concessionnaires, 2 contrôles techniques, 23 garages et 7 stations-service).

L’analyse détaillée des commerces ayant disparu montre que les plus grands bâtiments abritant anciennement des commerces automobiles ont tendance à être détruits, rénovés ou vides (le temps du montage du projet) quand ils ne servent plus en tant que garages, alors que les petites surfaces (souvent des petits bureaux de vente de véhicules) sont assez facilement transformées en un autre commerce. Parmi les locaux détruits ou restructurés (pour des opérations de logement le plus souvent), 8 présentaient des volumes relativement importants qui auraient pu constituer des opportunités pour y implanter des ELU.

Ces commerces automobiles peuvent avoir des caractéristiques architecturales très variées. Tous ne vont pas évoluer vers les mêmes usages, mais certains revêtent les qualités requises pour être réutilisés en tant qu’espaces de logistique urbaine (surface, hauteur sous plafond, portance, accès pour de gros véhicules…). À titre d’exemple, parmi les projets d’ELU actuels, plusieurs sont implantés dans d’anciens garages ou commerces automobiles :

  • le projet Villa du Clos de Malevart (11e) : RdC et sous-sol de logistique dans un ancien garage à étages, (local identifié en tant que périmètre de localisation dans le PLU) ;
  • le projet Intermarché de la rue de la Roquette : espace logistique dans une ancienne concession Opel (PLOC) ;
  • le projet rue Ordener de Corsalis dans une concession Volkswagen ;
  • le projet lié au parking de la Maison de la Radio réinvestissant une station-service ;
  • la folie Champerret à la Porte de Champerret du BP intérieur dans une ancienne station-service.

 

9- Tableau et photo © Apur


Conclusion

La comparaison des jeux de cartes établis en 2021 avec ceux élaborés en 2017 qui avaient été publiés dans l’Atlas des Grandes Fonctions Métropolitaines témoigne de la dynamique actuelle du marché de l’immobilier logistique. Cette tendance est la conséquence de l’évolution des comportements d’achat ainsi que de la prise de conscience de la nécessité de préserver les fonctions logistiques en centre-ville.
De nombreux ELU ont vu le jour et beaucoup de projets sont en cours, à des étapes différentes. Toutefois, la pression sur le marché logistique reste forte et la croissance du e-commerce actuelle laisse présager des besoins toujours plus forts dans le futur.
Pour compléter ce maillage, des outils réglementaires comme le PLU peuvent être utilisés afin de sanctuariser les lieux d’opportunité qui existent encore et qui sont transformés au fil du temps en d’autres fonctions.

Enfin, le présent travail cartographique a été réalisé à l’échelle de Paris, il est indispensable de garder une vision d’ensemble des équipements logistiques car les petits espaces de type ELU restent dépendants de leur approvisionnement depuis les moyennes et grandes plateformes métropolitaines et franciliennes. Le maillage des sites logistiques reste à préserver et développer à toutes les échelles notamment dans le cœur de la métropole pour fonctionner de la manière la plus optimisée et vertueuse sur le plan environnemental.

10- Les entrepôts logistiques dans la métropole du Grand Paris © Apur

 

Ressources

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  • Note

    Les sites logistiques actuels et potentiels - Contribution au groupe de travail immobilier pour la stratégie logistique parisienne

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